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Par Michel Janva le 8 juin 2022 6 commentaires
De Cyril Farret d’Astiès pour Le Salon beige :
Alors que les soutanes revenues du 40e pèlerinage de Chartres finissent de sécher, poursuivons nos réflexions suite à l’interdiction de l’archevêque de Toulouse faite aux séminaristes et aux diacres de porter la soutane. C’est un détail écrivent certains lecteurs du Salon Beige à ce sujet. Peut-être est-ce un détail, comme l’offertoire serait un détail, la communion sur les lèvres serait un détail, l’instauration de lectrices serait un détail. Cette accumulation de détails, qui vont tous dans le même sens, aboutit cependant à un petit détail qui est la perte de la foi en ce qu’est le prêtre et forcément également en ce qu’est la messe, en ce qu’est la Croix, en ce qu’est le catholicisme… Alors perdons encore un peu de temps pour évoquer ce détail.
Notons tout d’abord que cette interdiction est assez révélatrice d’un état de fait ; si l’archevêque a cru devoir agir, c’est donc que les cas sont nombreux. Réjouissons-nous que des séminaristes aient envie de ressembler à des prêtres, ce n’est pas toujours évident. Soit que les prêtres ne ressemblent plus beaucoup à des prêtres ; soit que certains séminaristes se destinent en réalité à du coaching personnel spirituel.
Pour résumer les faits et les idées déjà exposés sur le Salon Beige, rappelons que monseigneur de Kérimel a adressé le 2 juin un courrier à tous les séminaristes pour formuler très officiellement cette interdiction. Les motifs qui l’ont conduit à exprimer cet interdit sont les suivants : la soutane donnerait une image trop cléricale et créerait une distance avec les fidèles. Demander à des séminaristes de ne pas aspirer à l’état clérical et les forcer à se mélanger avec des laïques c’est véritablement tout mettre en œuvre pour faire avorter les vocations.
Michel Janva rappelait par la suite que canoniquement Mgr de Kérimel est dans son droit, quand bien même pastoralement sa décision est plus que saugrenue.
Quant à l’abbé Perrenx, distinguant “clerc” (à partir du diaconat) et “ecclésiastique” (à partir de “l’admission” parmi les séminaristes du diocèse), il faisait avancer la réflexion en précisant que l’on parle ici d’habit ecclésiastique et non clérical.
Proposons quelques idées complémentaires :
Il n’est probablement pas anodin que l’une des toutes premières mesures prise par la Révolution française contre l’Église en France aura été l’interdiction du port de l’habit clérical dès septembre 1790.
En 1962 fut autorisé dans le diocèse de Paris le remplacement de la soutane par le clergyman. En réalité, ce choix fut l’occasion de toutes les fantaisies et de tous les excès allant très vite jusqu’à l’absence totale d’habit et de signe religieux.
Par le motu proprio Ministeria quaedam du 15 août 1972 furent supprimés les ordres mineurs et la tonsure. La remise de la soutane, encore pratiquée ici ou là (en Pologne au moment de l’entrée en théologie comme le précise un lecteur du Salon Beige ou à la communauté Saint Martin par exemple), est à présent dans une zone grise.
À Rome même, elle ne semble plus avoir la cote. Rappelons-nous que l’un des premiers actes du Synode sur l’Amazonie a été de faire « voler » la soutane des participants comme le rapporte Jean Bernard dans le n° 319 de La Nef.
Le canon 284 indique que les clercs porteront un habit ecclésiastique convenable, selon les règles établies par la conférence des Évêques et les coutumes légitimes des lieux. Voilà une prescription typique du relativisme normatif de ces dernières années.
La soutane, nous l’avons dit, est davantage qu’un vêtement de travail. Elle est la livrée du Christ. Dans les communautés traditionnelles les années de séminaire sont l’occasion, année après année de revêtir cette livrée, depuis la tonsure et la vêture de la soutane jusqu’au joug de la chasuble au jour heureux de l’ordination sacerdotale. Une soutane, donc, qui n’est pas vêtue clandestinement, contre l’autorité de l’ordinaire ; prise, puis ôtée, puis reprise en cachette, mais conférée par le pouvoir de l’Église pour dire au monde le début de la transformation du jeune homme qui aboutira à la naissance d’un nouveau prêtre pour l’éternité selon l’ordre de Melchisédech. Ainsi, pourquoi s’en passer, pourquoi priver les séminaristes de cette aide surnaturelle offerte par l’Église, particulièrement dans le marasme actuel et les difficultés abyssales dans lesquelles se débattent non seulement les recteurs de séminaires mais les séminaristes eux-mêmes, pris en étau entre une Église qui ne sait plus les accueillir et un monde qui ricane. La réception de ces ordres les habitue et habitue les laïcs à cette hiérarchie consubstantielle à la nature de l’Église.
Et nous disons bien réception.
Ainsi la responsabilité des évêques est-elle grande de s’arcbouter sur ce refus de conférer la soutane aux séminaristes. C’est pousser ces jeunes gens à la désobéissance et à un certain relativisme (port clandestin et port à éclipse).
Finalement il en est de ce sujet comme de la communion dans la main ou du service de l’autel par les femmes. Après une phase de rappel de la discipline et de la saine pratique surviennent quelques autorisations spécifiques bientôt généralisées et qui aboutissent à l’interdiction de fait ou de droit à ce qui fut pendant des siècles et des siècles la louable pratique de l’Église.
Terminons sur la question de l’habit ecclésiastique en appelant, comme en bien d’autres sujets, à retrouver les anciens usages dont la cohérence et le succès ne sont plus à démontrer.
Enfin, suggérons aux candidats au sacerdoce dans le choix de leur séminaire de faire preuve de réalisme. En cet octave de la Pentecôte, il est plus que temps de demander pour eux les dons de sagesse, d’intelligence, de force, de science, de crainte de Dieu, de conseil et de piété.
Cyril Farret d’Astiès