30 juin 2022
Nous ne pensons pas que la nouvelle lettre pontificale Desiderio Desideravi ait beaucoup d’importance – au plus tard à la mort de François, elle tombera dans l’oubli avec la plupart des autres textes signés par lui. Elle contredit trop fortement la tradition de l’Eglise dans des parties importantes, elle est trop dévalorisée par ses contradictions internes appartenant à l’écriture personnelle de François. Il va néanmoins de soi que les déformateurs de l’Eglise en Allemagne, qui se sont rassemblés autour du portail katholisch.de financé par les évêques et qui pratiquent l’aberration synodale, tentent de faire leur miel de ce document. Le rédacteur Neumann donne aujourd’hui, sous le titre « François défend le Concile contre la restauration », un long exemple de la manière dont les néo-protestants se représentent les choses. Au centre de l’argumentation de Neumann – et de celle de beaucoup d’autres déformateurs de l’Eglise – se trouve la thèse, également défendue par François depuis Traditionis Custodes, selon laquelle la réforme liturgique de 1969, si destructrice, est sacrée et irrévocable en tant que réforme voulue par « le Concile », et que celui qui ne l’accepte pas de tout son cœur s’oppose au Concile, à l’Eglise et au Saint-Esprit. Anathema sit !
Peter Kwasniewski a déjà dit hier ce qu’il fallait dire à ce sujet et l’a confirmé avec de nombreuses preuves : Il est prouvé que cette thèse est fausse et ne peut être avancée que par ignorance ou par mauvaise foi. Même Romano Guardini, appelé à tort par François comme témoin principal, s’est distancié du « travail de plombier » de la commission de réforme. Chez Kwasniewski ainsi que dans d’autres articles sur New Liturgical Movement (Recollections of a Vatican II Peritus by Alfons Cardinal Stickler) et Rorate Caeli, beaucoup de choses importantes ont été écrites à ce sujet – d’autres suivront sans aucun doute dans les jours à venir.
Lors de sa première lecture de Desiderio Desideravi, le fr. Zuhlsdorf a déjà attiré l’attention sur le fait que les différentes parties du document proviennent apparemment de différents auteurs et ont été tricotées à la va-vite, non sans contradictions. En parcourant le DD, nous avons remarqué une autre contradiction qui n’avait pas encore été remarquée :
La première moitié du document tente d’établir une « théologie de la liturgie » et esquisse dans ce cadre une théologie du saint sacrifice de la messe. Alors que le titre de l’exhortation apostolique, avec l’allusion à la dernière Cène, ainsi que certains passages du texte peuvent faire naître le soupçon que cette théologie est unilatéralement axée sur la célébration de l’Eucharistie comme « repas de mémoire et de communion », il n’en reste pas moins que dans les affirmations principales (paragraphes 7 à 20), la « théologie du sacrifice » établie de manière si impressionnante par le Concile de Trente et confirmée depuis par tous les papes est tout à fait reprise et confirmée – même si c’est parfois dans un langage un peu particulier et dans la terminologie brumeuse du « mystère pascal ».
Ce qui est important, c’est que de ces explications théologiques, aussi insuffisantes soient-elles à certains égards, on ne peut nulle part et en aucune manière déduire que la lex credendi de la tradition, incarnée par le rite des saints papes Grégoire et Pie V, serait en contradiction avec la lex credendi des innovations de 1969, prétendument si fondamentalement modifiée par « Le Concile ». Il y aurait des différences dans l’accentuation et la manière de s’exprimer ainsi que dans l’approche pastorale et le sens du style – mais pas sur le fond. DD aurait ainsi coupé court à l’argument principal en faveur de l’interdiction de la liturgie traditionnelle – à moins que l’on ne veuille également déclarer les différences à ce niveau comme étant insupportables et inadmissibles. Dans ce cas, il faudrait naturellement abolir tous les rites différents dans l’Église et éliminer les milliers de variantes au sein du Novus Ordo.
Bien entendu, les adversaires de la liturgie traditionnelle – qui, avec la lex orandi qu’ils propagent, veulent en réalité imposer une nouvelle lex credendi qui n’est plus catholique – n’admettront pas la perte de leur argument principal. Pourtant, tout successeur de François qui ne se laisserait pas transformer, comme lui, en partisan des réformateurs radicaux, saurait quelles conclusions il devrait tirer des explications données dans DD sur la lex credendi. La liturgie transmise n’est pas en contradiction avec l’enseignement vrai et immuable de l’Eglise, mais en est l’incarnation la plus parfaite.
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Interventions supplémentaires
- Luisella Scrosati critique avec des mots très durs le ton fondamental de DD, hostile à la tradition, et souligne en particulier le fait que François prône de manière sans précédent la rupture avec son prédécesseur immédiat, Benoît. Original italien dans La Nuova Bussola Quotidiana, allemand chez Beiboot Petri.
- Plus d’informations sur la « théologie de la réforme liturgique » douteuse en DD chez Fr. Zuhlsdorf.